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17 août 2009 à 09:10 dans Actualité, Lectures publiques d'AIAPEC | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
http://www.granma.cu/frances/2009/agosto/vier14/34golpistaF.html Les putschistes
honduriens s’en prennent aux étudiants de l’ELAM
LES forces putschistes au Honduras ont chargé violemment des étudiants de l’Ecole latino américaine de médecine (ELAM), en visite dans ce pays et qui portaient secours à plusieurs manifestants blessés.
Dans un entretien téléphonique depuis Mexico, Silvia Ayala, députée du Parti Unification démocratique, a affirmé que les jeunes ont été frappés et emmenés dans une station de police alors qu’ils portaient assistance à des victimes de la répression policière à San Pedro Sula.
Certains portaient plusieurs blessures et des marques de coups, a précisé Ayala, qui a pris la tête de la résistance pacifique dans la deuxième ville de ce pays d’Amérique centrale.
Les faits se sont produits alors que la situation ne cesse de se dégrader au Honduras, où le gouvernement de facto a décrété l’état d’urgence devant les importantes manifestations qui se déroulent depuis déjà 47 jours, en faveur du retour de l’Etat de droit.
Pendant ce temps, la tension sociale est montée d’un cran, après la répression militaire et la poursuite de la crise provoquée par le coup d’Etat, sans aucune solution négociée en vue, précise Prensa Latina.
Les forces armées et la police ont lancé hier une vaste opération d’interpellation des opposants qui manifestent pour exiger le rétablissement de l’ordre constitutionnel et le retour du président Manuel Zelaya.
Le Front national contre le coup d’Etat, dans
plusieurs communiqués, a dénoncé la brutalité des
actions des militaires et de la police, notamment les
mauvais traitements, les actes de tortures et les
bastonnades contre les détenus. (SE)
16 août 2009 à 22:20 dans Ailleurs, Amérique Latine | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Lundi, 06 Juillet 2009 , Michel Collon |
Notre fil rouge pour décoder l'info : les 5 règles de la propagande de guerre |
A
chaque guerre, coup d’Etat ou agression menée par l’Occident, les
grands médias appliquent ces cinq « règles de la propagande de guerre
». Employez vous-même cette grille de lecture lors des prochains
conflits, vous serez frappé de les retrouver à chaque fois : 1. Cacher
l'Histoire. 2. Cacher les intérêts économiques. 3. Diaboliser
l’adversaire. 4. Blanchir nos gouvernements et leurs protégés. 5.
Monopoliser l'info, exclure le vrai débat.Application au cas du Honduras
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16 août 2009 à 22:16 dans Ailleurs, Amérique Latine | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
| CADTM | www.cadtm.org/spip.php?article4678 |
Au 46ème jour de lutte du peuple hondurien contre le Coup d’Etat et le gouvernement de facto, la Police et les Forces Armées ont une nouvelle fois fait preuve d’une extrême brutalité et d’une répression féroce à l’égard des manifestants. En dépit de la répression de la nuit dernière, une nouvelle manifestation qui a réuni des dizaines de milliers de personnes, pacifiques et déterminées, est partie de l’Université pédagogique. Elle allait se rendre au Palais présidentiel, mais à l’annonce de la loi votée par le Congrès National visant à rendre le service militaire obligatoire en cas de crise, les opposants au régime putschiste ont décidé de marcher vers le Congrès.
Alors que les manifestants avançaient vers le Congrès, le centre de la ville s’est vu encerclé par des centaines de militaires et de policiers en armes, empêchant la population de circuler librement et d’exercer son droit à manifester. Les manifestants ont alors subi de plein fouet la violence policière : gaz lacrymogènes, coups aux manifestants pris de panique, arrestations arbitraires, etc.
Suite à cette provocation des forces putschistes se déroule une confrontation devant le Congrès : la police lance des gaz contre les manifestants démunis, qui répondent par des jets de pierres. Après avoir gazé toute la place autour du congrès et le Parque central, les policiers et militaires pourchassent les manifestants qui essayent de fuir en se dispersant dans les rues, frappent les personnes qu’ils arrêtent. Des femmes ont subi des agressions sexuelles. A 14h30 devant le Congrès, alors qu’une vingtaine de personnes ont déjà été arrêtées, nous sommes témoins de l’arrestation d’une dizaine d’autres, dont nous avons pu noter les identités afin de les communiquer aux associations qui assurent le suivi juridique des personnes détenues, la COFADEH (Comité des Familles de Détenus Disparus au Honduras |1|) principalement. Les militaires et policiers s’en sont pris sans distinction et sans motif aux hommes, femmes et enfants. L’action collective sur la place devant l’édifice du Congrès a permis d’éviter la détention d’un mineur de quatorze ans, tandis que dans la cour du Congrès, on assistait impuissant à l’arrestation d’une professeur, Mabel Carolina Lopez, violemment maintenue au sol pendant près d’une demi heure par les militaires. Les éléments des forces armées qui étaient devant le Congrès élevaient leurs boucliers afin d’empêcher les journalistes de filmer, de prendre des photos. On bloque le passage à la délégation des droits humains, seule une procureur de COFADEH est reçue. Peu après, certains détenus sont apparemment transférés vers une caserne militaire tandis que d’autres sont amenés dans les sous-sols de l’édifice du Congrès. Un journaliste hondurien a également été agressé , les militaires lui ont arraché sa caméra. La répression était semblable voire plus cinglante en d’autres points du centre ville, ainsi qu’a San Pedro Sula, principale ville du Nord du pays.
Le régime putschiste a notamment utilisé le ’Poste 21’ composé de militaires des forces spéciales Cobra, forces tristement célèbres pour les tortures qui y ont été perpétrées dans les années 1980. Y ont été enfermées de façon tout à fait illégale 26 personnes, dont on apprend par le Front des Avocats contre le Coup d’Etat qu’elles ont été torturées, frappées, humiliées. Toujours détenues, le régime putchiste veut les inculper d’actes terroristes !
En tant que « Mission d’Observation », nous nous sommes rendus à l’Hôpital Viera où se trouvait le député du parti Unificacion Democratica (UD) Marvin Ponce, blessé par balles au pied, afin de recueillir son témoignage. Impossible d’entrer dans l’hôpital, le gardien avait reçu l’ordre de ne pas nous laisser rentrer !
Dans un même temps, l’Université pédagogique nationale Francisco Morazán (UPNFM), le point de convergence de la résistance hondurienne, a été transformée en forteresse militaire. Une quarantaine de personnes qui étaient à l’intérieur – professeurs, étudiants, syndicalistes, etc - ont été séquestrées plus de huit heures. Ils et elles ont été forcés à se rassembler au centre du terrain de basket, où les militaires les ont maintenus, l’arme pointée en leur direction. Il s’agit d’une détention illégale, réalisée par des forces militaires dans un lieu d’éducation supérieure publique dont l’autonomie est garantie par la Constitution.
Nous nous sommes rendus sur les lieux, accompagnés de deux avocates de la COFADEH afin de pousser à la libération des personnes détenues. Non sans mal, une journaliste de la Cofadeh parvient à rentrer, un avocat du Front des Avocats contre le Coup d’Etat était sur place. Le chef de police, Mr. Cerrato, déclare à la presse que les personnes retenues à l’intérieur font l’objet d’une enquête et doivent donner leur déclaration au sujet d’explosifs que la police et l’armée auraient trouvés à l’intérieur l’Université et attribuent aux opposants. Or, les personnes séquestrées expliquent que ces prétendues « preuves » sont du matériel utilisé par des infiltrés, des déchets de balles et de bombes lacrymogènes tirées la veille par la police contre l’Université.
Aujourd’hui 13 août, on reporte de nombreux blessés à l’Hôpital Escuela, le Consejo Civico de Organizaciones Populares e Indigenas de Honduras (COPINH) déclare que 5 personnes de cette organisation sont portées disparues depuis hier. Les chiffres concernant le nombre de détenus varient selon les sources (police et ministère public). On craint que de nombreuses personnes demeurent disparues.
Cette nouvelle démonstration de force de la part du gouvernement illégitime de Roberto Michelleti et l’établissement d’un régime autoritaire restreignant chaque jour davantage les libertés fondamentales du peuple hondurien font ressurgir le spectre des dictatures latino-américaines des années 1970-1980. Face à l’escalade de violences et de répression, aux violations graves des droits humains, civils et politiques, la solidarité des citoyens et des mouvements sociaux est indispensable. Entre autres revendications, le Front contre le coup d’Etat appelle à faire pression sur les gouvernements du Nord afin qu’ils bloquent tout soutien financier au régime de facto.
|1| Comité de Familiares de Detenidos Desaparecidos en Honduras, www.cofadeh.org
Jerome Duval et Cécile Lamarque sont membres du Comité pour l’Annulation de la dette du Tiers monde (CADTM). Sabine Masson est chercheuse à l’Institut des Hautes Etudes Internationales et du dévellopement à Genève. Tous trois participent à la Mission internationale d’Observation et d’Accompagnement des organisations sociales en lutte contre le putsch au Honduras.
16 août 2009 à 21:53 dans Actualité, Ailleurs, Amérique Latine | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
Mémoire des luttes
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http://www.medelu.org/spip.php?article231
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Chronique - juin 2009 / Bien plus qu’une simple grippe
mardi, 2 juin 2009
/ Ignacio Ramonet / Président de l’association Mémoire des Luttes
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Sur la rive texane de la vallée du Rio Grande, à deux pas de la frontière avec le Mexique, se trouve Harlingen, coquette petite ville américaine où, le 5 mai dernier, Judy Trunnell est décédée. Cette institutrice de 33 ans venait de donner naissance, par césarienne, à une jolie petite fille en pleine santé. « C’était une personne admirable et chaleureuse qui se consacrait à l’éducation d’enfants handicapés » ont déclaré ses parents et amis réunis pour les funérailles [1].
Le destin a voulu que Judy ait été la première victime, aux Etats-Unis, de la nouvelle grippe que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) appelle désormais A(H1N1) - un nom aseptisé afin d’éviter l’emploi de « grippe mexicaine », qui déplait aux autorités mexicaines, ou de « grippe porcine » qui contrarie les grands industriels de viande de porc.
Sans se laisser berner par cette astuce terminologique, le mari de Judy, Steven Trunnel, a dénoncé devant la justice, le 11 mai dernier, l’entreprise de production de viande de porc la plus importante au monde : Smithfield Foods Inc. Cette multinationale possède, par le biais de sa filiale mexicaine Granjas Carroll, des élevages de porcs gigantesques près d’un village de trois mille habitants, La Gloria, dans la municipalité de Perote de l’État mexicain de Veracruz.
L’avocat de Steven Trunnell, Marc Rosenthal [2], a révèlé que cette firme élève plus d’un million de porcs entassés dans quelque deux cents porcheries situées dans cette vallée de Perote. Il ajoute que les habitants de la région se plaignent de la puanteur et des conditions d’hygiène exécrables des porcheries. Le plagnant demande des dommages et intérêts pour la « mort injuste de Judy causée par Smithfield Foods » et réclame « environ un milliard de dollars ». Marc Rosenthal se propose de dénoncer l’horreur des élevages industriels de porcs et d’apporter les preuves que la grippe A(H1N1) trouve probablement son origine dans ces fétides porcheries de La Gloria d’où elle s’est propagée au reste de la planète.
L’entreprise Smithfields Foods nie une toute relation entre ses installations et l’apparition d’un foyer de nouvelle grippe aux portes de ses fermes [3], mais un récent rapport de l’association GRAIN [4] semble le confirmer. Les experts de cette organisation non gouvernementale dénoncent l’augmentation à grande échelle des porcheries industrielles qui créent les conditions parfaites pour l’apparition et la propagation de nouvelles formes de grippes fortement virulentes. Ces élevages sont des bombes à retardement prêtes à libérer des épidémies mondiales. « La concentration d’énormes quantités d’animaux entassés dans un tout petit espace facilite une transmission rapide ainsi que le brassage des virus » déclarent, par exemple, en 2006, des chercheurs de l’Institut National de Santé (NIH) des Etats-Unis [5].
Trois ans auparavant, en mars 2003, la revue Science [6] avait déjà averti que la grippe porcine était en train d’évoluer en phase rapide du fait de l’augmentation de la taille des élevages industriels et de l’utilisation généralisée d’antibiotiques et de vaccins. Les virologues mettaient en garde précisément le Mexique et les Etats-Unis contre un cocktail explosif viral à venir [7]. Ils affirmaient qu’ « après des années de stabilité, le virus de la grippe porcine nord-américaine semble se trouver dans une phase de rapide évolution et produit chaque année de nouvelles variantes ».
Ils imputaient la mutation fulgurante des virus à l’entassement de porcs dans des élevages insalubres de plus en plus immenses, et à la vaccination des femelles ce qui produit une sélection des nouveaux virus mutants. Ces deux facteurs, avisaient les experts « augmentent la possibilité de l’émergence d’un nouveau virus transmissible entre humains ». Ensuite, le virus s’échappe et se disperse de façon imparable.
Dans ce même article, le Dr Christopher Olsen, virologue à la Faculté de Vétérinaire de l’Université du Wisconsin, à Madison, allait jusqu’à prophétiser : « Maintenant, nous devons chercher au Mexique la ferme où va apparaître la prochaine pandémie [8]. »Tout indique que cette ferme a été localisée. Et que l’enfer de l’épidémie actuelle a commencé à La Gloria, à faible distance des porcheries de Smithfield.
Smithfield Foods Inc. est une des plus grandes entreprises agroalimentaires de la planète et le numéro un mondial de la viande de porc. Son siège se trouve à Smithfield en Virginie et elle possède des filiales dans plusieurs pays à travers le monde. En Espagne, Smithfield Foods contrôle 24% du capital de Campofrío, leader espagnol de la production de viande de porc. Campofrío a fusionné en juin 2008 avec la filiale européenne Smithfield Holdings [9] du géant américain pour constituer une nouvelle entreprise Campofrío Food Group, leader européen du marché de la charcuterie (www.campofriofoodgroup.com) [10]. La firme avait acquis, en 2006, le groupe Aoste, leader français de la charcuterie, dont le siège (Smithfield France Services) se trouve à Landivisiau (Finistère) et détient les marques Justin Bridou, Cochonnou et Jean Caby (www.smithfield.fr).
Avec un chiffre d’affaires de près de 12 milliards de dollars, Smithfield Foods, qui approvisionne les chaînes de restauration rapide McDonald’s et Subway, est la troisième compagnie américaine la plus puissante de production alimentaire, après Archer Daniels Midland et Tyson Foods. En 2008, elle occupait le 222e rang parmi les 500 firmes les plus importantes au monde, selon la revue Fortune [11]. Mais elle a été fréquemment accusée de contaminer l’eau, le sol et l’air et de ne pas respecter les droits de ses travailleurs. Dans son rapport de 2005, intitulé Du sang, de la sueur et de la peur. Les droits des travailleurs dans les exploitations de viande et les granges avicoles aux Etats-Unis, l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch dénonce durement ses abus [12]. En 1997, elle s’était vu infliger une amende de 12 millions trois cent mille dollars pour violation de la Loi américaine sur les Eaux potables [13].
Afin d’éviter ces accusations, Smithfield Foods a délocalisé une partie de ses élevages dans des pays comme le Mexique, la Roumanie et la Pologne, où les lois pour la protection de l’environnement sont moins strictes (ou inexistantes), et où certains hommes politiques sont plus disposés à se laisser corrompre [14]. Grâce à sa filiale Granjas Carroll, Smithfield s’est donc installé dans une zone rurale reculée au Mexique, près de La Gloria, en 1994, profitant de l’Accord de libre échange nord-américain (Alena), entre le Mexique, les Etats-Unis et le Canada, et où il n’a plus besoin de s’inquiéter d’être accusé de violer quelque loi sur l’environnement.
Dans des baraquements à ventilation défectueuse et constamment éclairés pour stimuler leur croissance, les cochons vivent enfermés dans des cages qui empêchent tout mouvement. On les gave jusqu’à ce qu’ils atteignent environ 120 kilos. Les élevages sont de véritables cités de porcs, entourées d’océans d’excréments et de pourriture. La contamination et son impact sur la santé des habitants, ainsi que les fosses où sont déposés les déchets animaux, ont favorisé, dès 2004, la création d’un mouvement écologique protestataire. Granjas Carrol a réagi en le réprimant. De nombreux habitants de La Gloria et d’une dizaine de communautés qui vivent depuis des années dans cette infection et respirent jour et nuit un air nauséabond, se sont unis pour protester contre l’expansion de la transnationale. Ils ont organisé des réunions et des manifestations. L’entreprise les a attaqués en justice. Plusieurs activistes ont été arrêtés et condamnés, d’autres incarcérés et obligés de payer des amendes.
Un correspondant du quotidien La Jornada [15], Andrés Timoteo, s’est rendu sur les lieux pour décrire l’atmosphère dans laquelle vivent les habitants : « Des nuages de mouches émanent des fosses d’oxydation où l’entreprise Granjas Carrol déverse les déchets fécaux de ses fermes porcines. La pollution à ciel ouvert a déjà entraîné une épidémie d’infections respiratoires (…) Le vecteur épidémique serait des nuages de mouches qui sortent des fermes porcines et des fosses d’oxydation où l’entreprise mexico-étasunienne déverse des tonnes de fumier. »
Les habitants attribuent l’apparition des maladies à cette pollution et à l’empoisonnement de l’eau et de l’atmosphère.
Un autre reporter, Jorge Morales Vásquez, raconte dans Milenio [16] comment les habitants ont passé des années à protester contre l’expansion de l’entreprise porcine et comment ils souffrent de la répression policière et de persécutions. Durant son enquête, le journaliste a constaté à son tour « l’odeur fétide qui provient des fermes de porcs et que l’on respire toute la journée dans la petite communauté d’à peine trois mille habitants, ainsi que l’existence d’essaims de mouches qui infestent les domiciles des familles. ». Il a inspecté les alentours des « fosses d’oxydation » dans lesquelles les matières fécales des porcs sont soumises à un procédé de décomposition à l’air libre les transformant en gaz méthane, responsable des effluves empuantis qui inondent la zone. Le reporter a pu observer ce qu’on appelle les « biodigestores », sont de simples tranchées couvertes avec une porte métallique où sont jetés les cadavres des porcs malades, ou morts en se battant dans les porcheries. Il rapporte que « dans ces trous creusés dans le sol, les charognes se décomposent, représentant un foyer de contamination et de prolifération de mouches de la taille d’une abeille qu’on appelle au Mexique « muerteras », c’est-à-dire « croquemorts », et qui, poussées par le vent, voyagent en essaim jusqu’à La Gloria et envahissent les foyers… » De nombreuses familles déclarent avoir été affectées par de fréquents maux de têtes, des maladies gastro-intestinales et des voies respiratoires, et avoir développé des diarrhées, toux, infections de la gorge, vomissements et fièvres.
C’est à cet endroit, selon toute vraisemblance, que le virus A(H1N1) est passé du porc à l’humain, entre novembre 2008 et janvier 2009. Et il peut avoir commencé à infecter d’importantes quantités de personnes courant mars [17]. Mais les autorités fédérales mexicaines n’ont pas diffusé publiquement l’information. Mais le phénomène était tellement insolite que plusieurs organismes internationaux de santé ont commencé à s’inquiéter de ce qui se passait à La Gloria.
A tel point que, dès le 6 avril - soit 18 jours avant que le gouvernement mexicain alerte l’OMS de l’apparition d’un nouveau virus de grippe humaine -, le site web de Biosurveillance, qui appartient à Veratect [18], Centre du gouvernement américain chargé de l’information épidémiologique, rapportait que, à La Gloria, on avait constaté une série de cas étranges d’ « infections respiratoires semblables à la bronchite pneumonique avec fièvre et forte toux » et que « 60% des habitants » souffraient d’une nouvelle maladie atypique.
Les autorités mexicaines ont su rapidement qu’un foyer infectieux grave d’une grippe inconnue s’était déclaré dans la vallée de Perote. Et que les traitements habituels se révélaient incapables d’empêcher le mal de se diffuser rapidement. Mais elles n’ont pas donné l’alerte. Elles n’ont pas mobilisé sérieusement les services de santé et les chercheurs scientifiques. Elles n’ont pas non plus informé l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), à ce moment-là, de la gravité d’une situation dont le contrôle était en train de leur échapper.
Pourquoi le gouvernement mexicain a-t-il agi ainsi ? Selon des experts locaux, une telle « discrétion » s’expliquerait parce que les premiers cas sont apparus à la veille des vacances de Pâques, période cruciale pour l’industrie touristique mexicaine… Mais tout indique que la raison principale est diplomatique. Il s’agissait d’éviter que la visite de Barack Obama, prévue les 16 et 17 avril, deuxième visite à l’étranger du président des Etats-Unis après son séjour au Canada en février, soit reportée pour des raisons de sécurité sanitaire.
Pour le président mexicain Felipe Calderón, dont l’élection en juillet 2006 fut très controversée [19], la visite de Barack Obama signifiait une reconnaissance définitive. Rien, pas même la menace d’un nouveau virus dévastateur, ne devait la retarder. A cette date, l’épidémie avait déjà atteint l’entourage de Felipe Calderón. La preuve : un archéologue, Felipe Solis, qui - avec le président Calderón - avait accueilli au Musée National d’Anthropologie de Mexico, le président des Etats-Unis, était lui-même porteur du virus et devait décéder six jours plus tard… Un conseiller du secrétaire américain à l’Energie, Steven Chu, qui s’était rendu au Mexique pour préparer la venue du Président Obama, a été également contaminé par la nouvelle maladie. Le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a reconnu que même l’épouse, le fils et le neveu du fonctionnaire avaient présenté des symptômes de la nouvelle grippe [20].
Devant les proportions que prenait la pandémie, les services de santé mexicains ont enfin décidé d’agir en envoyant des échantillons médicaux pris sur certains malades de La Gloria à des laboratoires aux Etats-Unis et au Canada. Le 23 avril, le Laboratoire National de Microbiologie de l’Agence de Santé Publique du Canada à Winnipeg détectait le nouveau virus contenant à la fois des éléments de grippe aviaire, porcine et humaine, après analyse d’un échantillon provenant d’un enfant de cinq ans tombé malade en mars.
Cet enfant, aujourd’hui guéri, a été identifié comme le premier être humain infecté - le « patient zéro » - par la souche virulente de la nouvelle grippe porcine. Il s’appelle Edgar Hernández et son histoire, rapportée par le New York Times [21], l’a rendu célèbre. Edgar a raconté les sévères symptômes dont il a souffert quand tout a commencé à La Gloria le 9 mars dernier : sa tête le brûlait, il toussait, il avait mal au ventre, à la gorge, et avait perdu l’appétit [22].
Selon la revue Science [23], dans un article publié le 11 mai dernier, on estime que le 24 avril, jour où la pandémie a été rendue publique au Mexique, il y avait déjà probablement entre 6 000 et 32 000 cas de grippe porcine dans le pays, c’est-à-dire beaucoup plus que le chiffre annoncé par les laboratoires.
Il n’est pas évident que cette vague de grippe A(H1N1) soit, pour le moment, plus dangereuse que les infections communes des souches habituelles des virus saisonniers qui tuent chaque année entre 250 000 et 500 000 personnes dans le monde. Mais, selon Science, le virus A(H1N1) semble beaucoup plus contagieux que celui de la grippe banale. Pour sa part, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a averti que le nouveau virus pouvait encore muter, devenir beaucoup plus virulent et provoquer une pandémie qui pourrait se propager en trois temps. L’OMS signale que « la gravité de cette grippe vient de la tendance des pandémies à faire le tour du monde au moins deux, voire trois fois ». Actuellement l’époque habituelle de la grippe commence dans l’hémisphère sud. Le virus A(H1N1) pourrait s’y accoutumer aux antiviraux (Tamiflu) et passer par une nouvelle mutation avant de revenir dans l’hémisphère nord en octobre prochain, avec beaucoup plus de virulence, comme la terrible « grippe espagnole » en 1918. Tout indique cependant que la nouvelle épidémie sera moins sévère que celle de 1918 ; mais certains experts estiment qu’elle sera aussi létale que celle de 1957 (la « grippe asiatique ») qui avait provoqué plus de deux millions de morts…
Afin de protéger leurs citoyens, les gouvernements de la planète se sont approvisionnés en grande quantité du médicament antiviral Tamiflu (oseltamivir), un des rares traitements efficaces contre le virus mutant H1N1 (il se prend en comprimés par voie orale) et recommandé également par l’OMS.
L’histoire du Tamiflu dans ces circonstances, est des plus instructives. Il a été découvert par l’entreprise pharmaceutique Gilead Sciences Inc, dont le siège se trouve à Foster City en Californie. Gilead a cédé ses droits de fabrication et de commercialisation à la firme multinationale suisse Roche, laquelle lui reverse 22% de ses bénéfices annuels pour les ventes de Tamiflu.
Il est intéressant de noter que Donald Rumsfeld, ancien secrétaire américain de la Défense dans le gouvernement du président George W. Bush, et un des principaux idéologues de l’invasion illégale de l’Irak [24], fut président de Gilead Sciences Inc de décembre 1997 jusqu’à sa nomination au Pentagone en 2001, et en conserve un nombre important d’actions.
Une des premières mesures de Rumsfeld quand il est arrivé au gouvernement, a été de déclarer le Tamiflu d’usage obligatoire au sein des forces armées [25]. Les bénéfices de Roche et de Gilead, et par conséquent les gains personnels de Donald Rumsfeld, sont montés en flèche. Les actions de l’entreprise ont également monté en Bourse, à partir de 2003 quand sont apparues en Asie les menaces d’épidémie du Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et du virus H5N1 de la grippe aviaire.
Fascinés par la théorie du complot, certains en sont venus à en conclure que le détesté Rumsfeld devait être impliqué d’une façon ou d’une autre dans l’apparition de ces épidémies et en particulier dans celle du nouveau virus mutant A(H1N1).
C’est peu probable. La principale cause de cette grave menace sanitaire réside dans l’horreur de industrialisation délirante de l’élevage d’animaux de boucherie. L’impitoyable système de nourrissage intensif a radicalement transformé le secteur de l’élevage. Aujourd’hui, il ressemble plus à l’industrie pétrochimique qu’à l’heureuse ferme familiale dont parlent les manuels scolaires [26]. En 1965, par exemple, il y avait aux Etats Unis 53 millions de cochons répartis dans plus d’un million de fermes. Aujourd’hui, il y a 65 millions de porcs concentrés dans seulement 65 000 exploitations. Au sein de l’Union européenne, la production porcine atteint environ 260 millions de têtes… En France, le nombre de porcs à l’engrais, dans quelque 23 000 exploitations, s’élève à quelque 6 millions. En Espagne, il y a actuellement 25 millions de porcs (plus d’un demi porc par habitant…) et 92 % d’entre eux sont élevés dans des exploitations intensives semblables à celles de Granjas Carroll à La Gloria.
On est passé, en très peu de temps, des porcheries traditionnelles aux enfers concentrationnaires dans lesquels s’entassent des dizaines de milliers d’animaux qui échangent, au milieu de la puanteur et sous des chaleurs asphyxiantes, des virus pathogènes en grande quantité.
Ce type d’agriculture inhumaine, intensive et productiviste qui dés-animalise l’animal et le considère comme un simple produit industriel, un simple matériel à viande, et procure des bénéfices financiers, est le vrai responsbale de la pandémie en cours [27]. Tant que sévira ce modèle insensé, le désastre sanitaire nous menacera tous.
[1] Dépèche AP, 6 mai 2009.
[2] Austin American-Statesman, 13 mai 2009.
[3] Smithfield Foods Reaffirms No Incidence of A(H1N1) In Any of Its Herds or Employees. http://investors.smithfieldfoods.com/releasedetail.cfm ?ReleaseID=381309
[4] Influenza porcine : un système alimentaire qui tue. L’industrie de la viande libère une nouvelle épidémie. www.grain.org/articles/ ?id=49
[5] http://cruzrojoepidemiologia.wordpress.com/
[6] Bernice Wuethrich, « Infectious Disease : Chasing the Fickle Swine Flu », Science, mars 2003, Vol. 299, n° 5612.
[7] L’Organisation Mondiale de la Santé avertit aussi en 1999 d’une possible vague de grippe porcine au Mexique et recommande la création de laboratoires afin de développer des traitements d’immunisation, avec pour objectif de garantir la disponibilité de vaccins. Malgré ces avertissements, le Mexique est resté sans infrastructures de développement et de production de vaccins contre le virus de la grippe porcine. Pis, le gouvernement fédéral a fermé deux instituts spécialisés et abandonné ses investissements pour la recherche en produits biologiques.
[8] www.agenciamn.com/index.php/De-Pe-a-Pa/Mexico-sabia-de-la-amenaza.html
[9] Cette firme est présente en France, au Portugal, en Belgique, aux Pays Bas et en Allemagne. En France, elle contrôle les groupes Aoste (marques Calixte, Cochonou, Justin Bridou) et Jean Caby.
[10] Ses principaux actionnaires sont : Smithfield Foods (37 %), Oaktree Capital (24 %), Pedro et Fernando Ballvé (12 %), la famille Díaz (5 %), Caja Burgos (4 %), QMC (2%) et le groupe Fuertes (2%)
[11] Fortune, 28 mars 2008, http://money.cnn.com/magazines/fortune/fortune500/2008/snapshots/728.html
[12] www.hrw.org/reports/2005/usa0105/resumen_sp.pdf
[13] F. William Engdahl, « Cerdos voladores, Tamiflu y granjas industriales », 3 mai 2009. (Traduit de l’anglais par Felisa Sastre : www.lahaine.org/index.php ?p=37648)
[14] Luis Hernández Navarro, « Las ciudades de cerdos de Smithfield » (Les villes de porcs de Smithfield), La Jornada, México, 12 mai 2009.
[15] La Jornada, México, 5 avril 2009.
[16] http://impreso.milenio.com/node/8559659
[17] « Pandemic Potential of a Strain of Influenza A (H1N1) : Early Findings », Science, 11 mai 2009.
[18] www.veratect.com/media.html
[19] Lire Ignacio Ramonet, Le Mexique fracturé, Le Monde diplomatique, août 2006.
[20] www.rtve.es/noticias/20090430/miembro-del-sequito-obama-muestra-sintomas-gripe/273070.shtml
[21] The New York Times, 29 avril 2009.
[22] www.abc.es/20090430/nacional-sociedad/todo-empezo-edgar-20090430.html
[23] op.cit. à la note 3.
[24] Léase, Ignacio Ramonet, Irak, Histoire d’un désastre, Galilée, Paris, 2004.
[25] Ernesto Carmona, L’influenza porcine bénéficie-t-elle au Tamiflu de Donald Rumsfeld ?, www.rebelion.org , 2 mai 2009.
[26] Mike Davis, La grippe porcine et le monstrueux pouvoir de la grande industrie agricole, www.sinpermiso.info/textos/index.php ?id=2528
[27] Carlos Martinez, « Una multinacional americana es denunciada como culpable del brote de la gripe porcina » - (Une multinationale américaine accusée d’être coupable de la vague de grippe porcine), www.rebelion.org
16 août 2009 à 21:46 dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
09 août 2009 à 22:53 dans Directintox | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
"Avec la crise, j'ai cru qu'à la télé, dans les journaux, ça allait changer. Qu'on allait tous les virer, ceux qui étaient censés nous informer mais qui n'avaient rien vu venir, les experts qui se succédaient sur les plateaux pour nous dire que le marché ça s'autorégulait et qu'il ne fallait pas s'inquiéter. J'ai attendu l'émission spéciale en direct présentée par Marie Drucker, Arlette Chabot et Laurence Ferrari, où ils seraient tous tout nus et où on leur repasserait leurs déclarations de l'époque. J'ai attendu, attendu, et rien n'est venu."
Puisque "rien n'est venu", @si a donné carte blanche à Maja Neskovic, ancienne enquêtrice d'Arrêt sur Images et observatrice (déçue) du traitement médiatique de la crise financière. Pour éclairer d'un oeil neuf les questions économiques, et pour mettre (métaphoriquement) tout nus les experts, politiques et "faiseurs d'opinion" habitués des plateaux télé, Maja a choisi d'inviter l'économiste Frédéric Lordon, directeur de recherche au CNRS. Daniel Schneidermann est présent sur le plateau au titre de chroniqueur.
L'émission est animée par Maja Neskovic, et déco-réalisée par François Rose.
C'est là----> X
http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=2152
09 août 2009 à 15:29 dans Economie: sur la crise... et la dette, Médias | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)
01 août 2009 à 14:10 dans Actualité, Lectures publiques d'AIAPEC | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)