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Depuis 2003, nous rendons compte des résultats des enquêtes réalisées dans le cadre du programme interdisciplinaire Facultad Abierta de l’université de Buenos Aires[i]. Celui-ci se destine à l’étude des expériences des entreprises récupérées par les travailleur-e-s (ERT) en Argentine[ii]. Publiée en mai 2016[iii], la 5e enquête dresse un état de la situation, pointe les évolutions entre décembre 2013 et mars 2016 et s’attache plus particulièrement à analyser les premières conséquences des politiques mises en œuvre par le gouvernement de Mauricio Macri[iv]. En juillet 2016, nous rendîmes compte des difficultés auxquelles les ERT sont confrontées avec les hausses des prix de l’énergie décrétées par le nouveau pouvoir d’orientation ultralibérale[v]. Dans cet article, nous présentons l’actualisation des données et des caractéristiques générales du processus et nous concluons par les défis que les ERT vont devoir relever dans le nouveau contexte politique.
Poursuite du processus
En mars 2016, il existait 367 ERT actives en Argentine qui occupaient 15 948 travailleur-se-s. Depuis la clôture de l’enquête précédente en décembre 2013, 43 entreprises ont été récupérées et 6 ne sont pas parvenues à consolider le processus. Ce premier indicateur démontre que la récupération et la consolidation d’entreprises autogérées se poursuivent à un rythme soutenu depuis la crise de 2008. Parmi les ERT en activité, le total de récupérations postérieures à 2009 est désormais plus important que celui de celles issues de la crise de 2001, période communément identifiée au mouvement des ERT en Argentine. De même, le taux d’ERT n’ayant pas pu se consolider est bien moindre que celui observé pour les entreprises classiques, y compris les PME, puisqu’il est de 10% contre plus de 50% pour les entreprises classiques après 4 années d’activité, selon des sources du ministère du travail[vi].
Les récupérations d’entreprises n’auront donc pas été un processus éphémère puisqu’il se maintient dans la durée (15 années si on n’excepte les quelques récupérations réalisées au cours des années 90). La récupération en autogestion des entreprises, que les patrons ferment ou abandonnent, est clairement perçue comme une alternative viable par les travailleur-se-s argentin-e-s pour préserver la source de travail. Cette réalité corrobore les déclarations de José Abelli en 2009 : « Aujourd’hui, quel que soit l’endroit dans le pays, lorsqu’une entreprise ferme, les travailleurs brandissent le drapeau de l’autogestion. C’est le grand acquis de la lutte de la classe ouvrière argentine »[vii] ou d’Andrés Ruggeri en 2014 lors de la rencontre européenne de l’Économie des travailleur-se-s : « l’aspiration à la démocratisation de la production et à la redistribution des richesses est inscrit dans l’ADN des travailleurs »[viii].
Des répartitions territoriale et sectorielle relativement constantes
En termes d’implantation géographique, il existe peu de différences avec les périodes précédentes, hormis un nouvel accroissement du nombre d’entreprises dans la ville de Buenos Aires. Un peu plus de la moitié des ERT se situe dans l’aire métropolitaine de Buenos Aires (189), zone qui occupe la moitié des travailleur-e-s concerné-e-s (7 781). Un peu plus de 80% des ERT se trouvent dans la région de la Pampa (299)[ix]. Pour autant, comme nous l’écrivions précédemment, le processus couvre l’ensemble du pays : Nord-Est (28), Patagonie avec les grandes entreprises de céramique (23), Cuyo Centre-ouest (15) mais seulement deux dans le Nord-Ouest.
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