03 juillet 2014 | Par martine orange - Mediapart.fr
Depuis des mois, des négociateurs américains, européens et d’une vingtaine d’autres pays se retrouvent secrètement à Genève pour discuter d’un futur accord sur les services financiers. Sans Wikileaks, nous n’en aurions rien su. Dominique Plihon, économiste atterré, revient sur ce projet de traité qui veut couper « toute capacité des États à réguler la finance ».
Un nouveau sigle est apparu : TISA. Pour Trade in services agreement (accord sur le commerce des services). Sans les révélations de Wikileaks le 19 juin, décryptées en partie par L’Humanité le 25 juin, ce qui se trame à Genève serait resté totalement secret.
Depuis quelques mois, les pays de l’Union européenne, les États-Unis et une vingtaine de pays allant du Canada à la Chine, se retrouvent secrètement à l’ambassade d’Australie à Genève pour discuter d’une nouvelle libéralisation, celle des services financiers. Leur objectif est de passer outre les blocages de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour parachever la vaste entreprise de dérégulation mondiale, entreprise depuis plus de trente ans.
Jusqu’alors rien n’avait filtré de ces discussions. Aucun gouvernement, aucune organisation n’avait évoqué le sujet. Les négociations devaient rester si confidentielles que les documents, révélés par Wikileaks, insistent sur l’impérative obligation de ne les divulguer sous aucun prétexte, de travailler sur des ordinateurs sécurisés, de n’en faire aucune photocopie.
« Ce projet, c’est comme si nous n’avions rien appris de la crise financière. Il couperait toute capacité des États à réguler la finance. Tout serait abandonné », constate Dominique Plihon, professeur d’économie à Paris XIII, économiste atterré et membre d’Attac. Explications.
Mediapart. Sans Wilikeaks, les négociations sur la dérégulation des services financiers, qui se tiennent entre un certain nombre de pays, seraient restées inconnues. Quels sont les objectifs poursuivis dans ces négociations secrètes ?
Dominique Plihon. Ce que nous découvrons aujourd’hui n’est guère surprenant. Toutes les négociations dans le cadre de l’OMC sont dans l’impasse. Un certain nombre d’États ont décidé, sous la pression des lobbies financiers, de reprendre les discussions sur les services financiers. Des pays comme le Brésil et l’Inde ne veulent pas en entendre parler. Mais les autres, emmenés par les États-Unis et l’Union européenne, rejoints par vingt-deux pays, espèrent créer une dynamique et trouver un accord qui finira par s’imposer à tous.
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